En 1858, la pisciculture de Huninge dans le Haut-Rhin déverse quelques silures dans le bassin du Doubs. D’autres sont introduits, à la fin de ce même siècle, dans le canal du Rhône au Rhin. Au début des années 1970, on aperçoit en Seille, affluent de la Saône, les progénitures de spécimens importés du Danube, et acclimatés, depuis le milieu des années 1950, dans un étang de l’Ain. Le silure colonise désormais abondamment l’ensemble des bassins hydrographiques français, eaux saumâtres des estuaires comprises. Prédateur au sommet de la chaîne trophique, il malmène et met même en péril, selon les récentes études scientifiques aux conclusions convergentes, les populations de poissons migrateurs.
Sa première apparition dans la presse piscicole professionnelle remonte à octobre 1996. Un entrefilet moque alors l’inquiétude de Brigitte Bardot sur la présence de silures introduits en 1988, en accord avec le Conseil supérieur de la pêche (OFB aujourd’hui), dans les plans d’eau du bois de Boulogne, à Paris, pour éliminer les populations de brèmes et d’écrevisses américaines en excès. L’actrice effarouchée craint que le prédateur ne croque les toutous à leurs mémères folâtrant sur berges, n’engloutisse glouton canards et cygnes baguenaudant becs dans l’eau.
« Sale gueule »
Le carnassier fait, plus sérieusement, une deuxième apparition dans les colonnes du journal en juillet 1998. « On a mis du temps à prendre le silure au sérieux dans la région, mais aujourd’hui, il pèse de plus en plus lourd dans la balance alors qu’il ne fait pratiquement pas l’objet d’une pêche dirigée (près de 10 tonnes sur Saône aval et autant sur Rhône aval). » lit-on alors dans Le pêcheur professionnel. Est également évoquée une « prolifération ahurissante » créant un « déséquilibre » dans le peuplement piscicole. Deux ans plus tard, le même journal lui consacre un dossier de six pages. Le carnassier traîne sa « sale gueule » et sa « mauvaise réputation » dans ces eaux de Saône depuis une bonne vingtaine d’années déjà. L’espèce a essaimé depuis la Seille, un affluent de la Saône, où elle a été introduite au cours des années 1970.
Colonisation pépère
À l’orée des années 2000, les études scientifiques concluent à son innocuité sur la faune locale. Les biologistes disent alors d’elle qu’elle est « une espèce acclimatée et en extension. » Sa colonisation s’étend à l’axe Rhône-Saône, au Rhin côté français, à la Moselle, à une partie du bassin de la Loire, à une centaine de kilomètres de Garonne et de Dordogne, et à quelques autres portions localisées de fleuves, rivières et lacs. En 2018, un inventaire du Muséum national d’histoire naturelle le recense dans les cours d’eau de 85 des 96 départements de la métropole. Il n’est absent que du Pas-de-Calais, de la Manche, des Côtes-d’Armor, du Finistère, des Hautes-Pyrénées, d’Ariège, de Lozère, des Alpes de Haute-Provence, des Hautes-Alpes, de Haute-Corse et étrangement de Haute-Savoie. Le lac Léman en abrite pourtant des spécimens depuis quelque temps déjà. « Il colonise le lac du Bourget (Savoie) depuis une dizaine d’années. En 2013, on enregistrait une recrudescence des captures après la restauration, au nord du lac, de la passe à poissons de l’écluse de Savières en communication avec le Rhône. Sur le Léman, la colonisation est beaucoup moins avancée. Mais les prises accessoires des pêcheurs professionnels progressent régulièrement. Plutôt dans la partie sud du lac, le petit lac. Au nord, les prises sont plus anecdotiques » indique Chloé Vagnon, chargée d’étudier les populations de silures sur les deux lacs alpins dans le cadre d’une thèse en biologie et écologie menée au sein du laboratoire Carrtel de l’université de Savoie Mont-Blanc Bourget du lac et financée par la région Auvergne Rhône-Alpes.
Cohabitation d’étang
En 2008, la fédération des pêcheurs à la ligne des Bouches-du-Rhône juge son omniprésence sur l’étang des Aulnes, un plan d’eau naturel, classé Natura 2000, de 90 hectares situé sur la commune de Saint-Martin-de-Crau, dont elle a la gestion pour le compte du département des Bouches-du-Rhône, fort préjudiciable à l’équilibre biologique des lieux. Un pêcheur professionnel, Jean-Luc Fontaine, a alors mission de réguler les populations. En 2015, ces pêches cessent. Difficile aujourd’hui de dire précisément combien sont-ils. Mais l’étang est un spot de siluristes. « On évalue la population de silures de plus de 50 centimètres à environ 800 individus, l’incertitude variant entre 200 et 1400 » indique Samuel Westrelin, ingénieur-chercheur à l’Inrae d’Aix-en-Provence. Lui, suit à la trace acoustique et chimique, depuis 2017, une quarantaine de spécimens, de 80 centimètres à plus de 2 mètres, pour comprendre leur stratégie d’occupation de l’étang et analyser leur régime alimentaire. « Les inventaires piscicoles que nous réalisons montrent que les populations de poissons autres que le silure peuvent aussi être abondantes, avec des variations marquées d’une année à l’autre. L’étang est un milieu assez productif dans lequel cohabite une quinzaine d’espèces différentes. Depuis le début de nos suivis, brochets, perches et sandres sont plutôt bien représentés, sans qu’il soit nécessaire d’aleviner » précise Samuel Westrelin, en juillet 2020.
Lors de pêches de régulation, réalisées sur les 91 hectares du lac de Vaivre, à Vesoul (Haute-Saône), entre mars 2016 et mai 2019, Julien Merveaux, un pêcheur professionnel en eau douce, capture 1 250 silures pour un poids total de 7,8 tonnes.
Le suivi piscicole réalisé en 2008 par l’Onema (OFB aujourd’hui) sur le lac de Vaivre à Vesoul recensait trois silures.
Périls latents
Une quiétude qui n’est plus guère de mise sur les cours d’eau plus à l’Ouest. Dans l’estuaire de la Gironde, la campagne de civelles 2019-2020 était marquée par les captures continuelles de jeunes silures d’une dizaine de centimètres. 5 kilos notamment à l’occasion d’une seule marée. Des niveaux de captures inédits et particulièrement troublants. Les études menées en 2019 en Garonne et Dordogne par Migado font état d’un impact préoccupant du silure sur la biodiversité du bassin. Elles évaluent à 80 % le taux de prédation du silure sur la lamproie, montrent que 50 % de son régime alimentaire est constitué d’espèces anadromes, et qu’ils attaquent 40 % des bulls d’aloses au niveau du canal de fuite de Golfech. « On estime que les silures consomment sur ce bassin de 90 à 200 tonnes de poissons migrateurs chaque année » ajoute Frédéric Santoul, enseignant-chercheur du laboratoire d’écologie fonctionnelle et de l’environnement (EcoLab) de l’université de Toulouse. « Dans l’estomac d’un silure de 2 mètres, 62 kilos, que nous avons pêché sur la Vilaine, en août dernier, nous avons trouvé deux mulets de 1 kilo chacun » raconte un pêcheur professionnel en eau douce.
Silures juvéniles capturés lors de la campagne 2019-2020 de pêche à la civelle dans l’estuaire de la Gironde et contenus stomacaux
Frédéric Santoul est l’un des scientifiques qui, en 2012, auraient pu avoir les honneurs de Brigitte Bardot, en filmant des silures chassant, tels des orques quêtant les otaries sur une plage de l’océan Pacifique, les pigeons sur une grève du Tarn, un affluent de la Garonne. Son équipe, en collaboration avec Migado, observait, en 2016, les traques de silures dans le canal d’amenée de la passe à poissons du barrage de la centrale nucléaire de Golfech. « Les grilles posées aux extrémités de la passe semblent avoir plutôt bien joué leur rôle de protection des saumons. En eaux libres, les saumons sont plus véloces que les silures et peuvent facilement leur échapper. Sur les lamproies, les taux de prédation, en pleine eau, des silures ont été très élevés l’année dernière. En raison peut-être des faibles débits d’eau, mais ces épisodes d’étiage sont amenés à se reproduire. Les zones de fosses, lieux de repos de prédilection des silures, et zones où ils se pressent à la sortie de l’hiver, ont, semble-t-il, été des zones de passage difficiles pour les lamproies. » détaille Frédéric Santoul. Aux abords des frayères d’aloses, en aval du barrage de Golfech, 80 % des silures capturés par des pêcheurs professionnels mesuraient plus de 1,20 mètre. « Dans le canal de fuite de ce barrage, les pêcheurs professionnels ont été mandatés pour extraire les silures présents pour améliorer la libre circulation des migrateurs jusqu’aux zones de frayères. En 2019, 336 silures ont été prélevés sur trente relèves, permettant ainsi la remontée exceptionnelle d’aloses à la station de contrôle » précise Émilie Rapet, chargée de mission pour la pêche professionnelle en Gironde et Adour.
Esturgeons attaqués
En juin 2020, un des trois esturgeons bæri, d’une taille comprise entre 1 mètre et 1,25 mètre, échappés un mois auparavant, avec près de 3 000 de leurs congénères bæri et gueldenstaedtii, d’une pisciculture sur le Ciron, un affluent de la Garonne, et repêchés, en Garonne, par des pêcheurs professionnels spécialement mandatés pour cette pêche de récupération, « présentait des traces de morsures de silures. » indique Lise Mas de l’Institut des milieux aquatiques. Un constat d’attaques d’autant plus inquiétant qu’elles se sont produites dans des secteurs potentiellement occupés par les esturgeons européens (Acipenser sturio), espèce protégée faisant l’objet d’un conséquent programme européen de restauration. « En mai, un sturio de 1,30 mètre était capturé accidentellement1 » précise Lise Mas. « Des géniteurs de sturio, futurs reproducteurs dans un ou deux ans, commencent à faire leur retour sur leurs zones de frayères, des fosses de 10 à 18 mètres de profondeur en Garonne et Dordogne, ces mêmes fosses où semblent se réfugier les silures l’hiver. » poursuit Vanessa Lauronce de Migado. En 2018 et 2019, des photos sous-marines prises au printemps, période de frai des sturio, les montraient vides de tout occupant, « mais une absence de silures peut-être également liée à la présence de bateaux en surface ou à l’absence de nourriture » nuance la chargée de mission de Migado. « Le silure nous inquiète certes, mais il est une des préoccupations parmi d’autres pouvant mettre à mal le programme de restauration des sturio. Nous sommes aux prémices de la restauration de la population d’esturgeons européens. Tant que la population d’esturgeons européens n’est pas plus importante, nous ne pouvons pas évaluer l’impact du silure sur l’espèce. Le silure fait partie d’une des pressions potentielles sur l’espèce que nous allons surveiller et évaluer. » complète Vanessa Lauronce.
À fleur de peau
En octobre 2019, le Comite de gestion des poissons migrateurs (Cogepomi) Adour admet que le silure peut être un prédateur potentiel des poissons migrateurs. Lors d’un débat, au Conseil régional de la Nouvelle Aquitaine, sur la préservation de la biodiversité, son président Alain Rousset lance : « Je souhaite une éradication du silure de nos rivières. Je hais le silure. » Une déclaration tonitruante, politiquement un brin hasardeuse, et une perspective biologique irréaliste, qui suscitaient aussitôt une pétition énervée du collectif des pêcheurs de la région Centre Val de Loire. « De quel droit ? Ce poisson jusqu’à ce jour n’est pas reconnu comme indésirable, et ne fait partie d’aucune liste d’espèces dangereuses pour la biodiversité et son environnement. Un poisson qui vient de bien plus longtemps [sic] que certains le disent, qui a eu une expansion à un moment donné où les brochets et les sandres étaient en voie de disparition en grande partie à cause de la prédation humaine. C’est pour combler cette niche que le silure c’est [sic] développé, il fallait comme pour tout équilibre dans la nature, un plus fort. Le silure est aussi arrivé pour sauver la pêche, procurer un plaisir encore inconnu de la traque du gros poisson en bas de chez soi. Ce plaisir était réservé à des pêcheurs pouvant financièrement aller pêcher le tarpon. Mais plus que cela c’est un esprit nouveau et un vent de préservation qui vient d’arriver dans ce loisir. On ne tue plus sa prise, non ! on la remet à l’eau, et on se prends [sic] en photo avec. Et aujourd’hui en 2019 voilà que l’on reproche de faire de la préservation. La pêche c’est aussi un vecteur industriel important avec des emplois, des concepts comme pour une économie locale touristique. Alors nous disons non, dites non au projet d’éradiquer le silure en région Nouvelle Aquitaine. » argumentait-il, recueillant quelque 2 300 signatures.
En septembre 2020, Alain Rousset réfrénait son emballement. « Il est impossible d’éradiquer le silure. Mais il faut largement le réguler pour assurer la pérennité des espèces de poissons migratrices, populations du patrimoine biologique de la région. La collectivité investit des sommes conséquentes pour garantir une bonne qualité d’eau de nos rivières et de nos fleuves. » explique en substance le président de la région Nouvelle Aquitaine. « Mais je sais le plaisir que doit avoir un pêcheur avec un silure au bout de sa ligne » ajoute l’homme politique, pêcheur de loisir de truites par ailleurs.
Opposition forcenée
En juin 2020, 431 particuliers et 22 associations s’opposaient, via la participation publique, à la réalisation de pêches expérimentales de silures, un projet de l’EPTB Epidor, en collaboration avec les différents partenaires techniques du bassin, lancé après l’observation sur le bassin Adour-Garonne de la « diminution catastrophique enregistrée sur la migration des lamproies marines ces dernières années. » Arguments pêle-mêle des défenseurs du silure : « cannibalisme de l’espèce, les gros mangeant les petits », « Moins de gros, c’est plus de petits, relançant ainsi une dynamique d’expansion plus forte qu’avant », « les passes à poisson des barrages constituent des goulots d’étranglement pour les poissons migrateurs qui deviennent des proies trop faciles pour des silures, prédateurs opportunistes », « pollutions, exploitations des gravières, dégradations anthropiques des milieux aquatiques, destruction des zones de frayères, surpêche détruisent les populations de poissons migrateurs. » Et ultime justification de leur opposition : « Le projet d’expérimentation n’a pour seul but que de favoriser à terme l’exploitation du silure par la pêche professionnelle ».
Micro-marché
Les données d’exploitation du silure font leur apparition dans les études socio-économiques sur la pêche continentale en 2002. Il en était pêché, cette année-là, tous bassins confondus, près de 11,9 tonnes sans toutefois de mention de la valeur marchande de cette production. Sept ans plus tard, les captures avoisinent les 30,5 tonnes pour une valeur de 182 904 €. « Le prix moyen du silure stagne depuis 2009, autour de 6 €/kg, avec des différences importantes entre les bassins où il fait l’objet de volumes significatifs. 2 €/kg en Loire-Atlantique, où il est valorisé entier au niveau de prix moyen des grands cyprins (carpe, barbeau, brème…), autour de 5 € sur le cours moyen de la Loire (avec une part de vente de découpes) et proche de 10 €/kg sur le bassin Rhône amont-Saône, avec une part plus importante de produits de première transformation. » indique une étude, de décembre 2018, de France Agrimer sur la valorisation économique des espèces invasives d’eau douce en France. Cette même année 2018, la valeur des captures totales des pêcheurs professionnels d’Adour ne représente que 0,1 % du chiffre d’affaires total des pêcheries. Sa vente rapporte, toutes captures de pêcheurs de Loire-Atlantique confondues, 15 000 € soit 2,3 % du chiffre d’affaires total des pêcheries. C’est sur le bassin Rhône-Saône que les captures de silures deviennent vitales, en constituant 55,4 % du chiffre d’affaires de l’ensemble des pêcheries. Sur les lacs alpins, nul marché pour vendre le cas échéant des prises accessoires.
En juin dernier, une société hongroise interrogeait tous azimuts les acteurs de la filière pour tenter d’obtenir des droits de pêche sur le Rhône, la Saône et la Garonne, y implanter ses pêcheurs pour qu’ils capturent chaque semaine une tonne de silures – et la même quantité de carpes – production exportée ensuite en Hongrie. « Étant donné que notre pays n’a pas des côtes de mer, de ces deux types de poissons fluviaux font les hongrois des mets populaire durant les jours des fêtes de fin d’année. C’est pour cette raison que nous intéressons pour la richesse des fleuves en France de ces deux variétés des carnassiers. Nous le savons aussi, que en France les gens ne mangeront jamais ni la carpe ni la silure, et c’est bien comme ça, car vous avez une incroyable choix des autres superbes poissons des mers ! » écrivait la société par l’intermédiaire de la chambre de commerce et d’industrie France-Hongrie.
La bête rôde
En 2013, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques (Onema, OFB aujourd’hui) instaurait le groupe national de travail silure pour évaluer la nécessité de mettre en place des mesures de gestion. Année après année, rapports d’études scientifiques documentés après constats de terrain alarmants, il prenait invariablement note. En cette fin 2020, des bruits de couloirs évoquent sa prochaine remise en route avec l’intégration de représentants du bassin Rhône-Méditerranée.
« Les populations de silures semblent se stabiliser sur la Garonne, depuis 2008, et sur les grands bassins hydrographiques plus largement » certifie Frédéric Santoul. Mais difficile de dire à quels niveaux ses populations stagnent-elles.
En attendant, en ce mois d’octobre, le pêcheur professionnel, Jean-Luc Fontaine remet de nouveau, à la demande del’Inrae d’Aix-en-Provence, ses filets à silures dans les eaux de l’étang des Aulnes. « Les sonars de nos civeliers détectent les plus gros spécimens. L’hiver dernier, en remontant la Loire sur une dizaine de kilomètres, à hauteur de Nantes, j’en ai décompté une vingtaine. » décrit un pêcheur professionnel de Loire-Atlantique. Un de ses collègues en comptait, lui, une cinquantaine, sur le même fleuve, et sur une distance guère plus longue, quelques kilomètres plus en amont. Ils sont, peu ou prou, 600 à traîner, chaque année, leurs nageoires dans les parages de la passe de la centrale de Golfech, sur la Garonne.
Même constat d’abondance, teinté d’inquiétudes, sur le Bas-Rhône. Quand la quarantaine d’hameçons de la palangre longue de quelque 400 mètres de Dominique Anghelou, petit pêcheur côtier de Méditerranée et de poissons migrateurs dans l’estuaire du Rhône jusqu’à une vingtaine de kilomètres en amont de l’embouchure, traîne dans les eaux douces, par mégarde, à la faveur de changements de débits intempestifs du fleuve, les silures, « des gros », s’y accrochent immanquablement en nombre. « Jusqu’en 2008, j’en pêchais, de temps à autre, un petit de 2 à 3 kilos » commence Dominique Anghelou, pêcheur depuis une douzaine d’années. La fermeture, sur ce secteur du Rhône, de la pêche à l’anguille en 2009, à la suite de la mise en évidence de PCB, a, pour lui, laissé le champ libre à la prolifération des silures. « Les silures sont friands d’anguilles notamment, et la présence, à l’époque, de nombreux pêcheurs professionnels permettaient de réguler, un tant soit peu, les populations de silures qui se prenaient dans les capéchades (verveux). Depuis une dizaine d’années, les silures de cette zone, eux aussi sous interdiction de commercialisation en raison des PCB, ne sont pas pêchés, ni commercialisés par les pêcheurs pros. Et sans son seul prédateur, l’homme, leurs populations explosent, et leurs besoins de nourriture en ont également été décuplés. Je retrouve des silures de grosses tailles sur mes hameçons avec dans la gueule un bar qui s’était précédemment pris sur l’hameçon. Je suis alors obligé de décrocher et de relâcher ces silures conformément à la réglementation. Les milieux du Bas-Rhône jusqu’à son estuaire sont naturellement et exceptionnellement riches, mais force est de constater que les prédations importantes des silures appauvrissent considérablement la chaîne alimentaire des poissons migrateurs. Depuis 2009, mes pêches, toutes espèces de poissons migrateurs confondues, ont considérablement diminué. Si bien que je compte arrêter cette pêche à la palangre pour la prochaine campagne » conclut dépité Dominique Anghelou.
1. Toute capture accidentelle de sturio est déclarée et le poisson est ensuite remis à l’eau.